La dysplasie épiphysaire est la pathologie du développement qui affecte le plus fréquemment l’ossature des chevaux en croissance.

Cette maladie se caractérise par une enflure autour des plaques de croissance épiphysaires des os longs dans les membres d’un jeune cheval. Elle peut causer de la douleur, de la raideur dans les articulations ainsi qu’une boiterie.

La dysplasie épiphysaire a tendance à se manifester chez les poulains âgés de moins de sept mois. On l’observe principalement chez les pur-sang anglais et les chevaux de sport. Dans de rares cas, elle peut apparaître chez les chevaux jusqu’à l’âge de deux ans.

Une croissance rapide liée à une alimentation trop calorique est l’un des principaux facteurs de développement de la dysplasie épiphysaire. Cette pathologie est également associée à un entraînement excessif, à l’obésité et à des déséquilibres hormonaux.

Dans la plupart des cas, la dysplasie épiphysaire ne cause pas de problèmes graves, mais elle peut avoir des effets à long terme si elle n’est pas soignée rapidement. La reconnaissance rapide des signes cliniques et une prise en charge adaptée sont essentielles pour soutenir un cheval atteint de dysplasie épiphysaire.

Qu’est-ce que la dysplasie épiphysaire?

Anciennement connue sous le nom d’épiphysite, la dysplasie épiphysaire figure parmi plusieurs pathologies orthopédiques du développement qui peuvent affecter les chevaux en croissance.

Elle se caractérise par une inflammation des plaques de croissance épiphysaires, qui sont les parties des os où prend naissance la nouvelle matière osseuse. Cette maladie peut mener à un développement anormal de l’ossature.

La dysplasie épiphysaire touche le plus souvent le radius, le tibia, le canon et l’os du paturon (la première phalange).

Dans les cas graves, elle peut affecter les deux membres antérieurs ou postérieurs. Plus rarement, elle touche les quatre membres du cheval. [1]

Les symptômes

Le premier signe de dysplasie épiphysaire est souvent une enflure et de la chaleur au-dessus du genou, du boulet ou du jarret. Le cheval montre habituellement des signes de douleur lorsqu’on touche à cette partie du corps.

D’autres signes de dysplasie épiphysaire incluent ceux qui suivent :

  • des genoux évasés;
  • des articulations élargies ou anormales;
  • de la raideur et l’altération de la locomotion;
  • de la douleur ou de l’inconfort;
  • un changement de comportement;
  • une boiterie.

Le développement de la dysplasie épiphysaire

Lorsqu’un poulain se développe dans l’utérus (in utero), son squelette est composé de cartilage, une sorte de tissu conjonctif.

Au fur et à mesure que le fœtus grandit, la matière osseuse remplace ce cartilage selon un mécanisme appelé « ossification endochondrale ».

La majeure partie du cartilage s’est transformée en os au moment de la naissance du poulain. Cependant, il reste du cartilage au niveau des plaques de croissance ou des régions épiphysaires pour permettre aux os de continuer à s’allonger.

La race et le sexe du cheval ainsi que la nature de l’articulation concernée dictent le moment où les plaques épiphysaires se referment. La plupart sont complètement fermées lorsque le cheval atteint l’âge de 28 mois. [2]

Chaque partie de l’os porte un nom différent :

  • La diaphyse est la partie centrale de l’os.
  • Les métaphyses sont les parties légèrement évasées qui précèdent les plaques de croissance épiphysaires.
  • Les épiphyses sont les extrémités des os.

Chez les jeunes chevaux, les plaques de croissance se trouvent entre la métaphyse et les épiphyses. [3]

Lorsqu’un facteur quelconque perturbe la croissance des os longs, une inflammation peut se déclarer dans les plaques épiphysaires.

Elle se produit généralement lorsque l’animal grandit rapidement en conjonction avec un niveau d’activité accru, ce qui inflige un stress aux plaques épiphysaires. [4]

Les causes de la dysplasie épiphysaire

Comme pour d’autres maladies orthopédiques du développement, les chercheurs pensent que de nombreux facteurs sont à l’origine de la dysplasie épiphysaire.

Les causes présumées incluent la malnutrition, les défauts de conformation, l’entraînement excessif, l’obésité, les troubles endocriniens et l’infection. [3]

Des études indiquent que la suralimentation et la croissance rapide ne suffisent pas à elles seules à déclencher la dysplasie épiphysaire. Ce serait plutôt plusieurs facteurs agissant conjointement qui engendrent cette pathologie. [1]

La dysplasie épiphysaire peut être généralisée, lorsqu’elle touche plusieurs plaques épiphysaires, ou localisée, auquel cas elle se produit dans une plaque précise.

La dysplasie épiphysaire généralisée est fréquemment le résultat de l’alimentation ou d’un entraînement qui fait subir un stress aux plaques de croissance épiphysaires. [4] Un traumatisme ou une infection cause le plus souvent la dysplasie épiphysaire localisée.

Les causes nutritionnelles

La composition nutritionnelle de l’alimentation du cheval peut contribuer à l’apparition de la dysplasie épiphysaire en lui fournissant trop de calories et en stimulant une croissance excessive.

Si le poulain grandit à un rythme qui surpasse la capacité des plaques épiphysaires à s’ossifier et à s’adapter, cela peut entraîner des dommages structurels aux os.

Pour cette raison, les poulains qui grandissent rapidement et qui consomment une grande quantité de glucides solubles sont sujets au développement de la dysplasie épiphysaire. Parmi les exemples d’aliments riches en glucides, on compte les concentrés à base de céréales et les pâturages luxuriants.

Dans les élevages de chevaux à vocation commerciale, les poulains sevrés qui passent à un régime contenant plus de concentrés développent souvent la dysplasie épiphysaire dans la partie inférieure des canons antérieurs ou postérieurs.

On pense que c’est le cas dans ces fermes parce que les plaques épiphysaires du canon se ferment vers l’âge où ces exploitants font le sevrage de nombreux poulains. [4]

En plus des excès nutritionnels, les déséquilibres alimentaires peuvent conduire à la dysplasie épiphysaire. Par exemple, cette maladie est plus fréquente chez les chevaux dont l’alimentation contient un rapport calcium/phosphore déséquilibré[5]

Les déséquilibres d’oligo-éléments, notamment le zinc, le cuivre, le manganèse et le fer, sont également liés à un risque accru de dysplasie épiphysaire.

Les traumatismes

Un traumatisme et une prise d’appui inégale sur les articulations du cheval peuvent aussi causer la dysplasie épiphysaire.

Les anomalies d’angle ou de flexion des membres peuvent faire en sorte que le cheval ne prenne pas appui uniformément sur ses articulations. La dysplasie épiphysaire localisée se manifeste souvent à l’emplacement d’un défaut de conformation qui surcharge les plaques de croissance épiphysaires.

Certains cas de dysplasie épiphysaire surviennent après une période de manque de stimulation, lorsqu’on a restreint les mouvements du poulain en raison d’une maladie ou d’une boiterie, puis repris abruptement l’entraînement.

Une dysplasie épiphysaire traumatique peut aussi se manifester après une intervention chirurgicale. Si l’intervention chirurgicale perturbe les plaques de croissance épiphysaires, la région peut s’enflammer. [4]

La dysplasie épiphysaire d’origine infectieuse

Les poulains et les chevaux en croissance peuvent développer une dysplasie épiphysaire infectieuse dont l’origine est une plaie pénétrante à proximité de la plaque de croissance ou une infection sanguine (infection hématogène). Les poulains atteints de dysplasie épiphysaire infectieuse ont habituellement de la fièvre et paraissent affaiblis.

Dans de rares cas, la dysplasie épiphysaire peut aussi débuter in utero chez les juments atteintes de placentite[6] Dans ce cas, un agent infectieux provoque l’inflammation du placenta.

La dysplasie épiphysaire d’origine infectieuse est une forme potentiellement fatale de la maladie qui requiert une intervention vétérinaire immédiate. [7]

De tous les types de dysplasie épiphysaire, la forme infectieuse affiche le taux de survie le plus faible. Il se situe à court terme entre 42 % et 84 %, mais un traitement précoce peut améliorer le pronostic des chevaux atteints. [8]

Diagnostiquer la dysplasie épiphysaire

Les poulains et les chevaux en croissance reçoivent généralement un diagnostic de dysplasie épiphysaire en raison de la présence d’une région épiphysaire élargie ou d’une inflammation autour des plaques de croissance épiphysaires. D’autres données cliniques peuvent également entrer en ligne de compte, comme l’âge du cheval et l’emplacement de la lésion. [9]

Bien qu’il soit généralement facile de diagnostiquer cette pathologie, cela peut être plus ardu lorsque les signes cliniques sont subtils.

Les vétérinaires ont habituellement recours à la radiographie pour poser un diagnostic, car cette méthode est largement accessible, abordable et peut être effectuée sur le terrain au besoin.

La radiographie révèle le plus souvent une plaque épiphysaire anormale et élargie[1] Les images radiographiques peuvent également montrer une accumulation modérée de liquide synovial dans les articulations.

L’échographie est un autre outil utile pour identifier l’enflure des articulations. L’échographie permet aussi de voir les sites d’érosion précoce ou de perte de cartilage articulaire.

L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est une méthode supplémentaire de diagnostic qui permet de visualiser les tissus mous. [6] L’IRM est une technologie plus onéreuse et les vétérinaires l’emploient plus rarement.

Diagnostiquer la dysplasie épiphysaire d’origine infectieuse

En plus des techniques d’imagerie, l’arthrocentèse peut être utile pour diagnostiquer une dysplasie épiphysaire d’origine infectieuse. Cette procédure consiste à extraire du liquide synovial de l’articulation touchée pour l’analyser.

Le liquide synovial normal est clair, jaune et visqueux. Le liquide synovial d’une articulation infectée est trouble (opaque), jaune foncé ou orange, et moins visqueux (plus fluide). [6]

Chez les poulains atteints de dysplasie épiphysaire infectieuse, il faut toujours procéder à l’arthrocentèse des articulations voisines pour déterminer si l’infection s’est propagée. [10]

Les analyses sanguines sont aussi cruciales pour diagnostiquer et surveiller d’éventuelles infections dans d’autres parties du corps, y compris les organes. Les tests sanguins permettent d’évaluer l’état nutritionnel, immunitaire et électrolytique de l’animal. [6]

Le traitement de la dysplasie épiphysaire

Dans les cas bénins, les chevaux atteints de dysplasie épiphysaire guérissent souvent spontanément d’eux-mêmes sans trop d’intervention. Cependant, certains cas requièrent un traitement thérapeutique pour guérir complètement.

Un diagnostic de dysplasie épiphysaire est une bonne occasion de revoir le programme d’alimentation et d’entraînement du cheval concerné et d’apporter les modifications nécessaires pour mieux soutenir la santé de son ossature.

L’alimentation

La première étape pour traiter la dysplasie épiphysaire consiste souvent à éliminer les calories superflues de l’alimentation du cheval. Il faut aussi s’assurer que le rapport calcium/phosphore est équilibré.

Il convient de prêter attention aux taux d’inclusion des oligo-éléments et des protéines. Dans certains cas, un supplément de vitamine D peut être bénéfique. [5]

L’entraînement

Il peut d’autre part être nécessaire de modifier l’intensité de l’entraînement du cheval pour éviter de surcharger ses articulations. On doit parfois confiner temporairement les poulains dans une stalle garnie de litière moelleuse ou un petit enclos afin d’éviter que les plaques de croissance épiphysaires subissent d’autres traumatismes. [4]

La plus grande partie de la croissance des os longs se produit lorsque le poulain est au repos. Pour favoriser une croissance osseuse saine, les poulains doivent pouvoir profiter de périodes de repos en décubitus (en position allongée) suffisantes.

Plus le cheval est jeune, plus le taux de croissance est rapide et plus ces périodes de repos comptent. [4]

Il faut se rappeler que le principal objectif de la réadaptation des poulains atteints de dysplasie épiphysaire est de stimuler la mobilité et d’éviter que les membres ne deviennent trop lâches ou trop raides. Il faut donc remettre les poulains en liberté au pré dès que possible pour qu’ils conservent des articulations saines.

Les médicaments

Si la dysplasie épiphysaire est le résultat d’une infection bactérienne, on aura recours à des médicaments antimicrobiens, c.-à-d. des antibiotiques, pour combattre l’infection.

Dans certains cas, l’ablation chirurgicale du tissu infecté peut être nécessaire. Le retrait des tissus infectés peut raccourcir la longueur du traitement aux médicaments antimicrobiens. [8]

Les vétérinaires prescrivent couramment des anti-inflammatoires non stéroïdiens systémiques (AINS) aux poulains atteints de dysplasie épiphysaire, en particulier ceux qui présentent une boiterie ou une enflure grave. Ces médicaments peuvent aider à soulager la douleur, à contrôler la réponse inflammatoire et à empêcher la contraction des tendons.

L’emploi des AINS pour traiter la dysplasie épiphysaire doit toujours avoir lieu sous la supervision d’un vétérinaire. Certains de ces médicaments peuvent entraîner une toxicité chez les très jeunes chevaux.

Les AINS sélectifs à la COX, tels que le méloxicam, sont généralement plus sûrs dans ce cas. On déconseille la phénylbutazone (butazone) à cause du risque accru d’effets secondaires chez les jeunes chevaux. [8]

Les stéroïdes anabolisants sont une autre option de traitement, en particulier pour les chevaux qui grandissent rapidement. Ces médicaments peuvent aider à faire progresser la maturation des plaques épiphysaires et à diminuer les autres dommages à la région touchée. [4]

On doit surveiller l’évolution de la pathologie chez les poulains qui ne répondent pas au traitement initial en prenant régulièrement des radiographies. Dans certains cas graves, une intervention chirurgicale peut être nécessaire pour stabiliser les os et prévenir le déplacement ou les fractures. [1]

Le pronostic pour les poulains atteints de dysplasie épiphysaire

Dans la plupart des cas, le pronostic pour les chevaux atteints de dysplasie épiphysaire est favorable. La majorité des symptômes disparaissent d’eux-mêmes lorsque le squelette de ces chevaux atteint sa maturité et que les plaques de croissance épiphysaires se referment. [3]

Malgré cela, dans certains cas rares, la dysplasie épiphysaire provoque la fermeture prématurée des plaques épiphysaires affectées et cause des déformations angulaires des membres[1]

Chez les poulains atteints de dysplasie épiphysaire d’origine infectieuse, la boiterie peut perdurer en raison de dommages aux articulations, aux plaques épiphysaires ou aux tissus mous à proximité des articulations. [8]

Cette forme de dysplasie épiphysaire conduit plus fréquemment à la détérioration du cartilage articulaire, à l’épaississement de la capsule articulaire, à une réduction de l’amplitude des foulées et au développement de l’arthrose. Ces conséquences peuvent malheureusement avoir une incidence sur l’avenir du poulain en tant que cheval de sport.

Il n’est pas toujours possible d’éviter cette pathologie, mais les propriétaires peuvent prendre certaines mesures pour diminuer l’incidence de la dysplasie épiphysaire et d’autres maladies orthopédiques du développement.

Les propriétaires de poulains peuvent aider à prévenir la dysplasie épiphysaire en donnant à leurs chevaux une alimentation équilibrée qui contient tous les nutriments essentiels nécessaires pour stimuler une croissance osseuse saine. Il faut éviter de donner trop d’aliments concentrés et de tenter d’accélérer le rythme de croissance des jeunes chevaux.

Le régime alimentaire doit plutôt viser à favoriser une croissance lente et régulière qui ne surcharge pas les articulations en développement. Vous pouvez en apprendre plus sur le sujet en lisant notre article sur les 8 plus grands principes pour favoriser la santé articulaire chez les chevaux.

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Références

  1. Jackson, M.A., et al. Severe bilateral physitis with instability and Salter-Harris type 1 fractures in two foals. Equine Veterinary Education. 2011.
  2. ?uszczy?ski, J. et al. Effect of horse breed and sex on growth rate and radiographic closure time of distal radial metaphyseal growth plate. Livestock Sci. 2011.
  3. Sirin, O. and Alkan, Z. Developmental Orthopaedic Diseases in Foals. Kafkas Univ Vet Fak Derg. 2010.
  4. Bramlage, L.R. Physitis in the horse. Equine Veterinary Education. 2011.
  5. Whitton, C. Physitis in Horses. Merck Manual. 2015.
  6. Lindegaard, G., et al. Haematogenous septic arthritis, physitis and osteomyelitis in foals: A tutorial review on pathogenesis, diagnosis, treatment and prognosis. Part 1. Equine Veterinary Education. 2020.
  7. Hall, M.S., et al. Surgical treatment of septic physitis in 17 foals. Australian Vet J. 2012.
  8. Lindegaard, G., et al. Haematogenous septic arthritis, physitis and osteomyelitis in foals: A tutorial review on pathogenesis, diagnosis, treatment and prognosis. Part 2. Equine Veterinary Education. 2020.
  9. Ineson, A.C., et al. A comparison of subjective and quantitative methods for detection of physitis in Thoroughbred foals. New Zealand Veterinary Journal. 2011.
  10. Glass, K. and Watts, A. Septic Arthritis, Physitis, and Osteomyelitis in Foals. Vet Clin North Am Equine Pract. 2017.